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En quoi le Bitcoin pourrait dissuader les États de faire la guerre?

9 octobre 2023

L’adoption croissante et fulgurante du Bitcoin à travers le monde a suscité un débat sur son rôle potentiel dans la transformation des économies que la cryptomonnaie pouvait engendrer. Une idée intéressante a également émergé concernant l’impact potentiel de Bitcoin sur la prévention des guerres. En effet, pour de nombreux adeptes du bitcoin, le Bitcoin serait une monnaie incompatible avec l’idée de guerres et de conflits armés.

Alors que le conflit israélo-palestinien réouvre un nouveau chapitre sanglant, cette perspective sur le Bitcoin nous semble plus que jamais pertinente à analyser. Cet article explore cette idée intriguante et examine comment Bitcoin pourrait contribuer à un avenir plus pacifique tout en soulignant ses limites.

De l’idée d’un bitcoin « pacifique »

À première vue, la connexion entre Bitcoin et la prévention des guerres peut sembler improbable ou fortuite. Cependant, cette idée a été développé par des économistes tel que Saifean Ammous dans « The Bitcoin Standard ». L’idée repose sur l’hypothèse que les guerres sont financées par une impression massive de la monnaie par les gouvernements. Comme le rappelle l’historien Pierre Bezbakh, « la France et l’Allemagne eurent recours à l’usage de la planche à billets et à l’emprunt pour faire face aux dépenses occasionnées par la première guerre mondiale ». Il est aujourd’hui admis que les guerres – d’autant plus au cours du 20è siècle- ont recours à la planche à billet pour financer les guerres.

L’usage de la « planche à billets » par la banque centrale constituait le moyen le plus simple de financement des dépenses de l’Etat. 

Pierre Bezbakh, Comment les belligérants ont financé 1914-1918

Dans cette logique, si l’on retire la capacité aux États d’imprimer de manière illimité de la monnaie, la possibilité de faire des guerres s’estompent. Or, c’est précisément ce que propose Bitcoin dans son protocole : l’impossibilité de modifier l’offre de bitcoin émis. Contrairement aux monnaies gouvernementales qui peuvent être sujettes à une inflation incontrôlée, le Bitcoin est conçu pour être rare et limité à 21 millions d’unités. Cela signifie que personne, pas même les gouvernements, ne peut augmenter l’offre de bitcoins pour financer une activité quelconque.

C’est cette caractéristique fondamentalement « déflationniste » qui serait fondamentalement incompatible avec le financements des guerres.

Bitcoin et la « préférence temporelle »

L’autre argument qui explique en quoi le bitcoin pourrait empêcher des guerres repose sur le concept de « Préférence temporelle ». Développée par l’économiste Irving Fisher dans « La théorie de l’intérêt », le terme se réfère à la préférence des individus pour la consommation immédiate par rapport à la consommation future. Selon Fisher, la « préférence temporelle » fait qu’il sera préférable pour les individus de choisir un dollar de cadeau dans l’immédiat ion plutôt que recevoir un dollar de revenu dans le futur.

Cependant, il faut savoir que la préférence temporelle est plus ou moins faible selon les individus et les circonstances.

Dans l’angle de lecture de la monnaie et de l’épargne, les les individus sont incités à épargner et à investir pour l’avenir si la monnaie est stable et qu’elle conserve sa valeur au fil du temps. Dans ce cas, les individus sont sont prêts à retarder la gratification pour de meilleurs résultats à long terme. Ils ont une « préférence temporelle » faible. A contrario, lorsque la valeur d’une monnaie est instable ou en déclin, les individus sont incités à dépenser immédiatement plutôt qu’à épargner pour l’avenir. Dans cette situation, les individus auront davantage l’envie d’être épicurien et de dépenser une monnaie qui inévitablement sera moins valorisée dans le futur.

Par conséquent, si les individus possèdent du bitcoin, ils seront tentés par une approche d’épargne, d’autant plus que le cours du Bitcoin ne cesse d’être à la hausse depuis sa création (bien qu’il connaisse des périodes de baisse cyclique).

Le « holding » est d’ailleurs le leitmotiv de nombreux bitcoiners. L’expression renvoie au fait d’épargner le plus possible de bitcoin et d’attendre qu’il soit adopté davantage et que cours prenne toujours plus de valeur.

Financer les guerres par l’inflation

Lorsque les gouvernements décident d’imprimer de la monnaie supplémentaire, cela a pour conséquence immédiate de diluer la valeur de la monnaie existante. Finalement et en faisant volontairement des raccourcis, la plupart des guerres sont financées par l’inflation, qui est essentiellement, rappelons-le, une taxe invisible sur les détenteurs de la monnaie. Plus encore, les dépenses de la guerre peuvent entraîner une augmentation de la dette publique.

Si les gouvernements optent pour l’émission supplémentaire de monnaie, c’est qu’il n’y a pas d’autres choix autres que celui d’augmenter les impôts. Devant un choix qui vraisemblablement serait impopulaire ( surtout pour financer une guerre), les États sont contraints d’utiliser la méthode de la planche à billet.

Si l’on suit la logique, un État qui posséderait du Bitcoin ne pourrait pas financer la guerre par l’inflation et serait donc contraint d’abandonner l’initiative belligérante. Bien entendu, l’État pourra toujours augmenter les impôts et les taxes. Cela rendrait la guerre plus coûteuse et encore plus impopulaire auprès du contribuable. Finalement, les États seraient décourager à déclencher des conflits armées et chercheraient alors à bâtir leur économie dans la paix.

Des limites à considérer

Bien que l’idée que Bitcoin pourrait contribuer à prévenir les guerres soit fortement séduisante auprès des bitcoin, il est crucial ici de souligner ses limites. Il est vrai, par exemple que Bitcoin soit résistant.à l’inflation mais cela ne signifie pas pour autant qu’il n’est pas sujet à des fluctuations de sa valeur. La volatilité de Bitcoin bien que celle-ci a tendance à s’estomper au cours du temps peut être un obstacle à son adoption. Certaines personnes pourraient avoir peur de posséder du bitcoin sur le long terme.

De plus, l’idée que Bitcoin pourrait prévenir les guerres repose sur l’hypothèse que les gouvernements adopteraient Bitcoin comme monnaie de réserve. Pour le moment ce n’est pas le cas bien qu’il y ait deux pays à savoir le Salvador et la République centrafricaine qui aient décidé d’en faire une monnaie légale. Pour le moment et pour les avantages que cela leur procure, les gouvernements ne semblent pas prêt à abandonnent leur capacité à contrôler leur propre monnaie.

Enfin, et l’argument le plus triste contre cette idée est que même si Bitcoin pouvait potentiellement dissuader les gouvernements de financer les guerres par l’inflation, cela ne suffirait pas pour garantir la paix. Comme nous le savons tous, les guerres peuvent être déclenchées pour de nombreuses raisons et certains trouveraient le moyen de se battre même sans recevoir de financements. Pire, on peut imaginer dans un scénario extrême que cela pourrait ouvrir et favoriser des milices terroristes qui recevraient des financements détournés.

Mot final sur l’aspect pacifique du Bitcoin

L’idée que le Bitcoin puisse contribuer à prévenir les guerres est certes une idée à la fois intrigante et bienheureuse mais elle possède aussi ses limités. Bien que le Bitcoin ait le potentiel d’encourager une préférence temporelle faible et de dissuader les gouvernements de financer les guerres par l’inflation, cela ne pourrait être suffisant étant donné que le guerre semble incomber à la nature humaine. Dans une vue fataliste, il y aura toujours des raisons de faire la guerre qui dépasseront les raisons économiques.

Néanmoins, la possibilité que Bitcoin puisse jouer un rôle, même mineur, dans la promotion de la paix mérite d’être examinée et prise au sérieux. Enfin même Bitcoin n’est pas la solution miracle pour la prévention des guerres , on peut naïvement penser qu’il puisse contribuer à un avenir plus pacifique entre les individus à défaut de le faire entre États….

Voir aussi :

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Ines Aissani

Éditrice du journal ZoneBitcoin, tombée dans le terrier du Bitcoin et farouchement convaincue qu'il peut apporter une solution aux problématiques liée à l'inclusion financière.

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