manifestants politiques

Le bitcoin permet de lutter contre le régime autoritaire au Nigéria

13 décembre 2022

On évoque souvent le Bitcoin sous l’angle financier en insistant sur les prouesses de sa hausse continue depuis son existence. Or, ce n’est pas là le seul lieu où bitcoin vient « disrupter » l’environnement. Et, c’est même peut-être là aussi que bitcoin prend un sens tout particulier. Après tout, la conception même du Bitcoin dérive de l’idéologie des CypherPunks, qui plaçait la confidentialité et la liberté au coeur de leur combat. Ce sont là les origines du Bitcoin et c’est donc sur le terrain de la liberté d’expression que Bitcoin révèle toute son utilité.

Les pays les plus puissants du monde, comme les États-Unis ou la Chine ne pourrait pas arrêter le réseau Bitcoin. Aucun gouvernement dans le monde n’a les capacités techniques de contrôler, de modifier et encore moins d’arrêter Bitcoin. On ne peut pas empêcher -techniquement- des personnes de s’envoyer du bitcoin, à travers le monde.

C’est pourquoi Bitcoin est qualifié de « résistant à la censure« . Ce terme essentiel dans la compréhension de la blockchain implique qu’aucune autorité centrale ne contrôle le réseau. Ainsi, à l’épreuve des régimes les plus autoritaires et sous l’ angle de l’observation politique, Bitcoin est à la fois un moyen et une fin. Un moyen de lutter contre les sanctions économiques et une finalité politique pour ceux qui veulent se battre pour un monde plus libre.

La liberté d’expression

De nombreux exemples nous ont montré que Bitcoin peut aider les populations les plus démunis à se financer. Bitcoin apporte une liberté financière sans égale pour les opposants. Les transactions anonymes et à moindre frais, réalisés en dehors du système bancaire nationale font la force du réseau bitcoin. Cela permet alors de contourner facilement les sanctions économiques appliquées.

On peut citer les manifestations qui ont éclaté à Lagos, au Nigéria en 2020. Les forces de police « SARS » ( Special Anti-Robbery Squad) se sont montré particulièrement violente envers les manifestants. Le gouvernement a gelé les comptes bancaires des groupes politiques soutenant les manifestants et activistes. C’est une pratique courante de la part des gouvernements que de passer par la répression financière pour limiter les actions des opposants. De fait, les manifestants se sont tournés vers les donations en bitcoin pour poursuivre leurs actions. Le mouvement #EndSARS qui a commencé sur Twitter est un un appel pour mettre fin à la brutalité policière au Nigéria et a été largement soutenu par des fonds en bitcoin.

Le mouvement EndSARS a ajouté une dimension politique au bitcoin, déjà largement utilisé dans le pays.Le Nigeria reste le premier pays africain (au prorata de sa population) à posséder le plus de bitcoin. Les échanges peer-to-peer en bitcoin ne cessent d’augmenter en volume, chaque année.

Source : « Nigeria Has Erupted Into Protests Over Police Violence »de Amanda Arnol https://www.thecut.com/2020/10/nigeria-endsars-protests-everything-to-know.html

Il n’y a pas que le Nigeria qui a utilisé Bitcoin pour soutenir les opposants politiques. L’Ukraine a reçu plus de 54 millions de dollars en donations bitcoin depuis le début du conflit avec la Russie.

En Biélorussie, lorsque les citoyens se sont rassemblés à Minks pour protester contre le président Alexandre Loukachenko, un fond « BYSOL » a été mis en place et a permis de récolter plus de 2 millions de dollars en bitcoin. En février 2021, le chef de l’opposition anti-Poutine Alexei Navalny a reçu plus de 300,000$ en dons bitcoin.

Les exemples sont de plus en plus nombreux et sont davantage visibles dans les pays émergents ou dans des régimes autoritaires. Cependant, même dans les pays les plus démocratiques, bitcoin sert les dissidences en tout genre. Le meilleur exemple a été les 45 millions de dollars (en ETH et BTC) récoltés pour soutenir l’activiste Julian Assange via le projet AssangeDAO.

Bitcoin permet de contourner les sanctions économiques

Les pressions financières ne sont pas utilisés uniquement dans le cadre nationale par certains régimes autoritaires. À l’échelle international, les États utilisent très souvent les sanctions économiques pour obliger certains régimes à se conformer et à suivre les règles internationales. Les embargo cubain ou iraniens en sont des parfaits exemples. C’est d’ailleurs pour ces raisons que le gouvernement iranien à décider d’utiliser le paiement en cryptomonnaies pour ses importations. Les sanctions économiques qui s’abattent sur un pays ont parfois des conséquences dramatiques sur la vie des citoyens ordinaires.

On peut invoquer ici les questions d’ordre éthique et se demander s’il est moral qu’une population souffre des actions d’une minorité au pouvoir ( et que très souvent elle n’a pas choisi)? Au lieu de s’épancher sur des dissertations sans conclusion, il semblerait que les individus choisissent alors d’agir et utilisent bitcoin comme moyen de contournement. Ainsi, ils peuvent recevoir des fonds de la part d’amis ou de soutiens à l’étranger de façon simple, sans aucunes restrictions.

Bitcoin, l’arme ultime des opprimés?

Il va sans dire qu’aujourd’hui Bitcoin est bien plus qu’un actif de spéculation. En réalité, c’est même une utilisation qui s’est greffé a posteriori sur Bitcoin. Pour quiconque qui prend la peine de livre le livre blanc du Bitcoin, il comprend très vite que l’objectif ultime est la possibilité d’émettre des transactions anonymes. Il comprend aussi que la résistance à la censure de toutes les formes que ce soit est la raison d’être du bitcoin; Son essence pour le dire plus clairement.

Il va de soi, alors, que les minorités ou les groupes oppressés dans le monde fasse appel à la cryptomonnaie comme outil de survie. Les ONG et les associations humanitaires utilisent également bitcoin récolter des fonds, dans des pays où les financements sont difficiles. Bitcoin reste alors le moyen de financement le plus simple à réaliser dans les pays où l’infrastructure financière est limitée.

Certes, on pourrait rétorquer que bitcoin permet aussi le financement de groupes extrémistes et terroristes. Cela est fort possible en effet. Bitcoin est neutre dans son acception et il peut être utilisé par des groupes politiques aux idéologies extrêmes.

Tout comme la monnaie fiduciaire, il est impossible de contrôler l’usage qui sera fait des cryptomonnaies. Cependant, de la même manière qu’on ne blâme pas la monnaie Fiat pour ses dérives, on ne saurait également blâmer bitcoin. Il semble important de ne pas chercher à « politiser » Bitcoin outre-mesure et à le considérer non pas comme un objet mais comme un outil politique…

Selon toute vraisemblance, les plus grands détracteurs du bitcoin ne s’arrêtent qu’à l’aspect volatile de son cours et s’acharnent à le réduire à un simple actif financier. C’est en réalité passer à côté de son autre aspect, hautement politique et profondément philosophique qui constitue tout son ethos.

Lire aussi : Par-delà la gauche et la droite : Pourquoi il faut dépolitiser Bitcoin

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Ines Aissani

Éditrice du journal ZoneBitcoin, tombée dans le terrier du Bitcoin et farouchement convaincue qu'il peut apporter une solution aux problématiques liée à l'inclusion financière.

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